Benoît Villain (Musée LaM / Lille): “les dispositifs mobiles contribuent à l’aspect contemporain du musée”

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Benoît Villain, Responsable des projets éducatifs et culturels du LaM à Lille répond aux questions de Clelia Dehon. Il revient sur les différents dispositifs et les innovations numériques mis en place.

Vous avez mis en place deux dispositifs recourant à l’utilisation du téléphone portable. D’une part un système impliquant l’usage de Codes QR, d’autre part une application iPhone. En ce qui concerne l’application, comment cela s’est-il déroulé ? D’où vous est venue l’idée ?

Benoît Villain : C’est une proposition que j’ai faite lorsque nous avons rédigé le cahier des charges. Que ce soit pour l’application iPhone ou le visio-guide. Car au départ, nous avions la volonté de mettre avant tout un visio-guide sur iPod à disposition des visiteurs. A partir du visio-guide nous avons réalisé une application iPhone plus légère, de façon à ce que l’on puisse permettre aux gens de préparer leur visite, mais aussi s’en servir comme outil de communication.

Votre souhait était-il aussi que l’application iPhone ne serve pas d’audio-guide, en d’autres termes, qu’elle ne remplace pas le visio-guide ?

BV : L’application sert également d’aide à la visite puisqu’il y a un parcours découverte. Il y a des extraits du parcours enfant, les actualités du musée, les informations pratiques… Mais le parcours complet vous le retrouvez sur le visio-guide disponible au musée.

Il y a donc les mêmes contenus sur le visio-guide et l’iPhone, mais plus enrichis sur le visio-guide ?

BV : Sur l’iPod, il y a tout ce que l’on appelle le « en savoir plus », c’est à dire des vidéos, des photographies, du son, en plus des notices sur les œuvres. Sur l’iPhone il n’y a que les notices sur une sélection de trente trois œuvres, c’est à dire onze œuvres sur chaque collection (art moderne, art brut, art contemporain). Ce qui représente un parcours minimal pour visiter le musée.

À propos des contenus, qui les rédigent ? les conférenciers ?

BV : Pour le visio-guide ce sont effectivement les conférenciers qui ont rédigés. C’est ensuite validé par la conservation du musée, puis ensuite transmis au prestataire. Ce dernier nous proposent une adaptation pour validation.

Pouvez-vous nous dire comment est né ce projet ?

BV : Nous avions déjà des audioguides au musée. Au moment de la fermeture, il y a eu la réécriture du projet scientifique et culturel du musée. Dans ce projet, il était question d’alléger les informations qu’on donnait aux visiteurs dans les salles, c’est à dire d’alléger la présence du texte sur les murs des salles. De ce fait, nous avons voulu faire passer les informations dans le visio-guide. Le projet était donc d’avoir un outil assez complet, gratuit, de façon à ce que l’on appose un minimum d’informations sur les murs, …  Ce qui nous intéressait également c’était de pouvoir donner aux visiteurs l’accès à des contenus d’archives : des extraits de vidéo, des photos d’archives, des textes manuscrits… mais aussi lui donner accès à des contenus qui venaient compléter l’analyse de l’œuvre : un texte de poésie surréaliste, un texte cubiste etc. Par exemple, cela permet au visiteur de comprendre que ce que mettent, les cubistes en place dans le cadre de la peinture, certains artistes y réfléchissaient également en poésie ou en littérature etc. Tout cela était donc le point de départ du projet.

 Cela vient peut être aussi en parallèle avec le fait que la réouverture du LaM est très récente, tout comme la mise à disposition de ces outils dans les musées (iPod, iPhone…). Cela confère sans doute un aspect « dynamique » et « moderne » à l’institution ?

BV : Oui, cela contribue à l’aspect contemporain du musée, c’est évident. Mais cela nous a aidé aussi à répondre à certaines questions de médiation auprès de certains publics. Le jeune public par exemple. Actuellement nous avons un parcours enfant, mais nous aurons aussi bientôt un parcours pour adolescents… Il y a, en plus de cela, la question de l’accessibilité. Un parcours de visite en LSF devrait être mis en place très prochainement.

Ce parcours sera-t-il accessible sur le visio-guide et sur l’application iPhone ?

BV : Il sera accessible sur le visio-guide et sur Dailymotion ou Youtube, puisque la société avec laquelle nous travaillons a fait plusieurs parcours de visite en LSF dans de grandes structures et souhaite faire un portail contenant toutes ces visites.

Bien que – par le biais d’un appel d’offre – vous travaillez avec la société Audiovisit qui se charge du développement de l’application, est ce que certaines autres applications ont pu vous inspirer pour celle que vous avez mise en place ?

BV : Au niveau de la mise en forme on travaille directement avec Audiovisit. Nous avons écrit le parcours, on a définit les contenus, on a proposé une arborescence. En fonction de ça ils nous ont proposé un scénario sur les parcours jeune public. Ensuite, en l’état actuel de la technique je pense que tous les musées qui ont une application iPhone dispose d’à peu près la même chose, le développement est relativement identique dans chaque institution.

Il y a certains musées qui prennent le parti de ne pas mettre de contenus supplémentaires…

BV : Oui, en revanche pour nous c’était un parti pris vraiment important : de pouvoir donner accès au public à une sorte de « bibliothèque », avec un contenu pas forcément présent dans une salle d’exposition.

Avez vous en amont observé d’autres systèmes nécessitant l’utilisation d’un téléphone ? Je pense par exemple aux bornes Bluetooth…

BV : Oui, on a envisagé d’en mettre une. Mais nous ne l’avons pas fait parce que nous avons préféré privilégier le site internet. Un des problèmes du Bluetooth, c’est qu’il passe assez mal avec les iPhone notamment. Ca demande aussi un certain temps pour accéder aux contenus… j’ai donc abandonné cette idée.

Pensez vous, à l’avenir, si vous avez de bons retours, développer cette application sur d’autres Smartphones ?

BV : On verra cela avec le temps et avec la société Audiovisit. Pour l’instant le parc d’iPhone est en train d’exploser, donc on s’est plutôt tourné vers ce mobile. Quand on a passé le marché, dans les entreprises qui ont répondu il y avait d’autres propositions techniques. Nous avons séléctionné Audiovisit puisqu’ils nous proposaient notamment une solution iPod avec une adaptation du contenu en version Smartphone et qu’ils ont l’habitude d’utiliser la plateforme Apple. Il faut aussi voir que l’Apple Store est une plate forme de communication importante. À partir du moment où vous avez votre visite sur cette plateforme, même si elle n’est pas accessible sur BlackBerry ou sur un autre format, c’est tout de même une ouverture assez importante. De plus, notre point de départ n’était pas forcément de développer le Smartphone mais la volonté de développer le visio-guide. Sur le site internet du musée, il y a la possibilité de télécharger certains contenus en MP3.

En ce qui concerne maintenant le dispositif des codes QR dans le parc du musée, comment cela s’est-il passé ?

BV : Il s’agit en fait d’un mécénat de compétence avec IBM et Urbilog. Nous souhaitions avoir un mécénat et eux étaient intéréssé de soutenir un de nos projets. Nous avons donc imaginé de réaliser une application pour le parc en géo-localisation. Nous n’avions pas inclus le parc dans le marché avec le visio-guide. Nous nous sommes donc appuyé sur ce mécénat d’IBM et d’Urbilog pour faire une visite des œuvres du parc en géo-localisation, c’est à dire que lorsque vous vous déplacer et que vous vous retrouvez devant une œuvre, votre Smartphone reçoit une information concernant l’œuvre devant laquelle vous êtes. Il s’agit en fait d’un site web mobile. Le QR code vous redirige vers le site accessible sur toutes les plateformes mobiles.

 C’est une compétence que IBM maîtrisait déjà ou c’est quelque chose de nouveau pour eux, qu’ils expérimentent avec le LaM ?

BV : C’est quelque chose qu’il maitrise mais n’avaient jamais testé dans ce type de situation. Cela se sent, car ils ont des compétences, mais peut être pas encore un mode de travail adapté à un musée. Le domaine de la culture est assez loin d’eux : développer un outils de médiation pour la culture c’est quelque chose qu’ils n’avaient jamais pratiqués. Cela leur permettait, si je ne me trompe pas, de mettre en application des systèmes qu’ils vont être amenés à développer et qu’ils n’avaient pas encore expérimentés.

Vous pensez développer ce type de dispositif pour les expositions ?

BV : Pas pour les expositions, car nous avons le marché avec Audiovisit. Mais pour l’extérieur du musée oui, peut être pour proposer du contenu sur l’architecture. Un prolongement du partenariat entre le LaM et Urbilog est une possibilité notamment grâce à des crédits recherches du pole e compétence en image de Tourcoing.

Si on se projette, d’une manière générale, vous pensez donc développer ce type d’outils ?

BV : Oui, tout a fait.

Vous avez eu des retours de la part du public ?

BV : Non pas encore.

Vous disiez qu’avant la fermeture du musée, vous disposiez d’audio-guides traditionnels. Il n’y a pas eu à un moment donné une question qui s’est posée, à savoir si mettre à disposition une application iPhone allait venir concurrencer le visio-guide ?

BV : Non, car ce n’est pas le même outil. Sur le visio-guide il y a deux parcours découvertes, deux parcours thématiques, le parcours en LSF, le parcours enfant, le parcours expositions… le tout traduit en anglais et néerlandais. Sur l’application iPhone il n’y a qu’un parcours, donc non il n’y a pas de concurrence. La personne qui vient avec l’application iPhone pour visiter, fera un parcours d’une heure maximum car ce n’est pas aussi complet que si vous louez l’appareil. L’idée c’est de donner envie aux gens de revenir et pourquoi pas de passer sur l’iPod.

Pour vous, il s’agit donc deux dispositifs complémentaires ?

BV : Oui et différents. Il y a les gens qui disposent d’un iPhone et peuvent télécharger l’application, mais avec le visio-guide, on répond à la majorité des visiteurs du musée qui n’ont pas d’iPhone.

Est-ce que vous avez un avis sur l’avenir de ces outils par rapport à l’audioguide ? Avez vous le sentiment que la tendance dans les prochaines années pourraient s’inverser, c’est à dire que la plupart des visiteurs seraient équipés en Smartphone et qu’il n’y aurait qu’une dizaine d’audioguides disponibles in situ ?

BV : Peut être, en tout cas je ne vois pas le problème et ce serait peut être même mieux pour les publics. Parce que l’application ici est gratuite, alors que pour avoir un visio-guide il faut payer. Si je suis visiteur je préfère télécharger l’application gratuite. Si, à terme, les appareils disparaissent des musées, c’est un coût de maintenance en moins. Mais à mon avis, il va falloir attendre un moment avant que cela n’arrive. Il suffit de regarder dans la rue, il y a encore des gens avec de « vieux » téléphones. Donc, oui, on aura toujours quelques appareils de disponibles in situ.

En terme de communication, comment avez-vous mis en valeur l’application ?

BV : Sur le site internet du LaM il y a une information, nous avons mis le lien pour la télécharger. Il y a eu aussi des communiqués de presse et on va certainement faire quelque chose de spécifique autour de la LSF.

Comptez-vous faire un bilan sur l’utilisation de l’application et du QR-code ?

BV : Nous sommes en train de voir pour mettre en place une enquête. Pas spécifiquement pour l’application, mais pour le visio-guide. On y inclura l’analyse des données que nous donnera Audiovisit sur l’application.

Pensez-vous que ce type d’outil pourrait inciter des publics peu habitués ou enclins à se rendre au musée ? Je pense que votre réponse sera positive, puisque vous développez une version de votre visio-guide spécifiquement en langue des signes ou encore pour le public adolescent…

BV : L’idéal pour nous serait effectivement de pouvoir toucher de nouveaux publics, comme le public étudiant. Cela nous permet en tout cas de donner une réponse à des publics déjà sensibilisés et pour lesquels nous n’avions pas encore forcément d’outils efficaces.

 

Interview réalisée parClélia Dehon, étudiante en management d’organisation culturelles. (dehonclelia@hotmail.fr) le 14 décembre 2010
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